L'HEBDO de Charente Maritime - Jeudi 10 juin 2004
TONNAY-CHARENTE
Mobilisation
générale contre le péage
par Christophe
CORITON
Mercredi 2 juin, en soirée, la municipalité invitait la population de la Capr à une réunion préparatoire à la constitution d'une association dont l'unique objectif serait l'obtention de la gratuité du tronçon de l'A837, entre Cabariot et Rochefort et ainsi pallier la saturation de l'avenue de l'Aunis.
Réunie au complexe
municipal, mercredi 2 juin en soirée, une soixantaine de personnes dont
les maires de la Capr (Communauté d'agglomérations du Pays rochefortais)
est venus assister au procès du péage de l'A837 C'est à
partir d'un constat alarmant et révélateur d'une inutilité
majeure que la municipalité de Tonnay-Charente s'est engagée à
obtenir la gratuité de l'A837 entre le péage de Cabariot et Rochefort-Le
Vergeroux.
En effet, très peu empruntée par les automobilistes et les routiers,
cette pseudo-déviation ne participe en aucun cas au désengorgement
de la RN137, comme il était prévu. Elle contribue davantage à
la saturation de cet axe routier dans la traversée de l'agglomération
tonnacquoise et du réseau secondaire. Sur l'avenue de l'Aunis, des pointes
de 42 000 véhicules par jour ont été enregistrées.
" L'autoroute ne nous a pas apporté d'amélioration ",
lance Jean-Pierre Guillon, maire de Tonnay-Charente. Le chef d'assemblée
dénonce également l'emprunt de la RN137 par les utilisateurs de
l'axe Bordeaux-La Rochelle. Ce qui réduit la ville à une simple
voie de transit. " On ne veut pas leur interdire de passer par Tonnay-Charente,
mais la gratuité du péage permettrait de décongestionner
la voie ", poursuit-il.
Ce péage représente un véritable budget pour les usagers
qui fréquentent quotidiennement l'A837 pour des raisons professionnelles.
A soixante centimes d'euros le passage, voilà de quoi dissuader les travailleurs
qui devraient quotidiennement deux, voire quatre fois la rocade et qui de ce
fait privilégient l'axe saturé de l'avenue de l'Aunis. Le tout
au détriment de cette " Autoroute des oiseaux ", l'a-t-on baptisée
à l'époque, qui comptabilise moins de 3 000 véhicules par
jour. Une aberration que le maire ne manque pas de pointer du doigt. "
C'est une " connerie " (sic) ", crache-t-il.
Et Didier Quentin, député, qui soutient cet engagement de renchérir
: " C'est une double " connerie " (re-sic), car j'étais
persuadé de rencontrer une bretelle de sortie au nord pour aller à
Saint-Jean d'Angély, et non. Je ne comprends pas pourquoi on n'en a jamais
construit ". Ils en ont tellement gros sur la patate que les élus
ne laissent pas de place à la poésie. Car, à ce stade,
la situation est préoccupante ; D'une part, l'insécurité
routière est permanente, et les riverains doivent constamment rester
sur le qui-vive pour éviter le danger. Et d'autre part, la santé
des habitants est en jeu. L'émanation de poussières cancérigènes
et le rejet de dioxyde d'azote fomentent une pollution sanitaire et environnementale
inquiétante. Sans compter le gêne sonore et le frein économique
que ce problème implique. Une pléthore d'arguments que l'association,
constituée par des habitants de Tonnay-Charente et de la Capr fortement
mobilisés, mettra en avant pour dénoncer l'inefficacité
du tronçon autoroutier en question. La commune tonnacquoise n'étant
pas personne physique, elle ne peut demander des comptes à la société
concessionnaire ASF (Autoroute du Sud de la France) et surtout, ne peut l'attaquer
en justice. Voilà pourquoi une association à but unique doit être
créée pour exiger la gratuité de péage entre Cabariot
et Rochefort-Le Vergeroux. " Les grandes villes se sont fait entendre,
j'espère que nous nous ferons entendre nous aussi et que nous aurons
l'appui de la Capr ". Une cotisation minime et symbolique sera demandée
puis transformée en subvention.
Un combat depuis longtemps engagé
Depuis plusieurs années,
le combat contre cette absurdité dure. La gratuité du péage
a, de longue date, été réclamée au président
d'ASF de l'époque ? Gérard Balle, qui a répondu banco…
si la collectivité rachète le tronçon d'autoroute concerné.
La note se révèle alors plutôt salée : 95 millions
de francs (14,5 millions d'euros), " soit deux beaux collèges ",
ironise Jean-Pierre Guillon. Quand la proposition d'ASF a été
présentée au Conseil général, pas un seul conseiller
ne s'est pas prononcé pour.
L'heure est donc à la création d'une association qui déploiera
son arsenal d'arguments et, si besoin est, n'hésitera pas à ester
en justice, en s'appuyant sur une jurisprudence favorable. Dans la salle, on
évoque le cas des grandes villes comme Toulouse, Lyon, ou Strasbourg
qui ont obtenu, parfois au terme de longs conflits la gratuité de leurs
rocades. Si lutte il doit y avoir, Jean-Pierre Guillon ne sera pas seul à
monter au créneau. Cette réunion d'information a mobilisé
la quasi-totalité des maires du canton et les deux élus présents,
Didier Quentin, député, et Jacques Boucher, conseiller général
du canton de Rochefort-sud et vice-président de la Capr, l'ont assuré
de leur soutien. Jacques Boucher précisant que ce genre de combat lui
plaît et qu'il " s'évertuera à monter au créneau
et négocier avec ASF pour arriver à la gratuité et balayer
ainsi cette verrue ".
Outre l'étude des principes juridiques, l'association relancera le département
et la Capr, puis mènera, si besoin est, des actions de terrain comme
l'organisation de manifestations, l'occupation du péage comme ça
s'est fait en d'autres lieux, etc. On peut compter sur l'imagination des opposants
quand il s'agit de rétablir le bon droit. La prochaine réunion
verra la constitution de l'association et le début de l'action.
L'octroi qui fâche
par Jean-Philippe BEQUET
Jean-Pierre Guillon a la
très désagréable impression de s'être bien fait avoir
sur ce coup. Lui, ses administrés et tous les usagers de ce tronçon
d'autoroute qui devait figurer une rocade de contournement de la ville de Tonnay-Charente.
Jean-Pierre Guillon n'a pas de mots assez durs pour qualifier les engagements
non tenus et les revirements de situation.
A la promesse non tenue de la gratuité du tronçon vient s'ajouter
le fait que le prix demandé est carrément plus cher que partout
ailleurs sur le réseau ASF. Chaque véhicule est, en effet, taxé
de 0,60 euro pour l'usage de 10 km d'asphalte et d'une belle gare de péage
(par ailleurs primée pour son esthétique), alors que 6 km sont
effectivement parcourus sur la concession ASF. Depuis sept ans, les usagers
paient donc 4 km de trop et Jean-Pierre Guillon n'hésite pas à
qualifier ce péage " d'octroi ". De la bouche de Didier Quentin
on entend même filtrer le mot " racket ".
Pire, lorsque l'on vient de saintes, après la gare de péage de
Cabariot, on paie pour le roulage sur ces 10 km, même si on sort 500m
après les cabines vers le rond-point qui dirige sur Lussant ou Muron.
" Finalement, non seulement ils nous font payer une autoroute qu'on nous
avait promise gratuite, mais en plus ils nous la font payer plus cher qu'on
aurait dû. C'est, je pense, un argument qui vaut dans le droit ".
Ce dossier a décidément tout faux sur toute la ligne puisque,
initialement prévue pour décongestionner l'artère principale
de Tonnay-Charente, c'est l'effet inverse qui se produit et qui fait de l'avenue
de l'Aunis, l'axe le plus fréquenté du département, après
la rocade rochelaise, avec des pointes à 42 000 véhicules par
jour. " Pour une voie qui traverse notre commune, ou d'un côté
on a le boulanger, de l'autre la boite à lettres, les habitants du secteur
prennent de réels risques quand ils traversent l'avenue. Tout ça
nous a amenés à dire que l'autoroute n'a pas apporté d'amélioration
à la circulation et cadre de vie de Tonnay-Charente, au contraire … ",
dénonce Jean-Pierre Guillon.