Article extrait du Sud-Ouest du 20-03-03
L'HÉCATOMBE DES DAMES BLANCHES AUX ABORDS DES ROUTES
Au printemps et à
l'automne, les bordures sont constellées de boules de plumes beiges et
blanches. Ces ont des cadavres de chouettes effraies également appelées
chats huants ou dames blanches. Elles sont victimes de la route. Leur hyperactivité
nocturne et les migrations les attirent sur les bas-côtés herbeux
ou elles cherchent mulots ou campagnols. Elles volent bas, à 1 mètre
du sol. Si une voiture survient, elles sont affolées par les phares.
Si c'est un camion c'est encore pire, car la cabine est plus haute et elles
n'ont aucune chance d'échapper à une collision. "J'avais
fait un comptage il y a quelques années sur deux axes du département
: la RN137 entre Saintes et la Rochelle et la D5 entre Aigrefeuille et Rochefort.
Sur ces seules deux routes, j'ai dénombré 1500 cadavres en une
année. C'est dire que sur l'ensemble du département, la mortalité
des effraies en bordure de routes se chiffre par milliers", commente Philippe
Jourde de la Ligue pour la Protection des Oiseaux.
"C'est l'automne la saison la plus meurtrière. Car il y a les jeunes
qui apprennent à chasser. Ils ont encore peu de métier et puis
il y a le retour des migrateurs. Le problème vient du fait que trop peu
de routes sont longées de haies pour obliger les rapaces à voler
plus haut et que, sur les quatre voies ; il y a souvent de larges bas-côtés
herbeux qui les attirent."
Le phénomène n'est pas propre à la Charente Maritime. Dans
les Vosges et en Bretagne, un inventaire très précis de l'hécatombe
a été réalisé. Ses résultats sont préoccupants
pour la survie de l'espèce. Il n'inquiète que les ornithologues.
Le Centre d'études des transports et de l'environnement s'en est également
ému. Normalement, la réalisation des futurs grands axes doit prendre
en compte cette donnée, au même titre qu'elle intègre des
passerelles pour la traversée des cervidés ou des sangliers, des
petits tunnels pour les loutres, les crapauds etc. Paradoxe : le tronçon
Saintes Rochefort qui participe largement au massacre a été baptisé
autoroute des oiseaux.
Thomas BROSSET
Journaliste