Septembre 2000
Texte extrait de notre journal VBA infos n°4
DE
LA NOTION DE PROGRÈS
Nous vivons
une époque de profonde mutation. Aussi, pour être sûrs de
parler la même langue, nous devons prendre le temps de redéfinir
certains mots-clefs que nous partageons.
Regardons "progrès" par exemple. Chacun emploie ce mot avec
aisance et décontraction, mais a-t-il la même signification pour
tous?
Pour Sartre, il "suppose une ascension qui rapproche indéfiniment
d'un terme idéal".
Certes, on est d'accord et si on nous demande de préciser cet idéal,
tous, dans un bel élan, nous parlerons de l'Intérêt de l'Homme.
Et c'est là le noeud du problème : parlons-nous la langue moderne
du XXIe siècle ou l'ancien français du XXe ?
A cette époque, en effet, l'Intérêt de l'Homme se confondait
avec les idées de vitesse, d'argent, de croissance...
Maintenant, nous parlons plus volontiers de qualité de la vie, de temps
retrouvé, d'environnement agréable...
Maintenant, nous avons compris, qu'à force de courir, on finit par s'écrouler,
que derrière une croissance sans frein se cache un cancer.
Maintenant, nous savons qu'il faut prendre le temps de réfléchir
aux conséquences de nos actes, que l'intérêt de l'homme
actuel peut être source de danger pour l'homme de demain, que la prudence
(l'intelligence?) consiste à privilégier la prévention.
Comment se fait-il alors qu'on nous parle encore de l'autoroute A831? Qu'on
annonce sa construction comme une certitude, alors que toutes les études
(notamment sur le plan hydrologique: grand problème s'il en est du siècle
à venir!) n'ont pas abouti, voire n'ont pas été entreprises.
...Eh bien, il semblerait que certains soient tombés dans le piège
grossier qui consiste à confondre l'Intérêt de l'Homme avec
les intérêts (au pluriel) de quelques hommes (avec un petit h).
Mais s'agit-il toujours d'un problème de linguistique?
Jacqueline GILLARD